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L'ange vagabond...

Publié le par Asna

Son regard premier dessinait une surprise étrange, et un sursaut léger traversa son corps maigre à partir de son visage, passant par ses entrailles, dormant enfin sur les rives de sa masculinité... C'était une rencontre bizarre, au milieu d'une rue puante l'odeur des toilettes et des égouts... Mais au milieu de cette rue imaginaire, de cette odeur insupportable, son sourire brillait comme celui d'un ange; d'ailleurs tout son corps semblait briller d'une lueur magique!

Aujourd'hui, je crois que cette lumière angélique était l'effet des longues heures passées sur la route pour le rejoindre enfin! En ce moment, il semblait être le dernier des hommes! Et cette rencontre était la seule qui comptait vraiment... En dehors de cette bulle imaginaire, rien ne comptait...

Espérer fleurir un amour premier dans un endroit pourri est un suicide!

Sur cette rue dégoûtante s'ouvrait une pièce encadrant un lit monté de deux matelas qui n’ont rien en commun que la trace des fesses du lion, et quelques meubles montés aussi d'objet différents suite à l'idée d'un sombre court métrage mort finallement... Dans cet amas de ferraille, à la lumière faible mais romantique de deux bougies, ce vagabond au visage d'un ange, venait poser sur mes lèvres un doux baiser, puis un autre, puis encore un troisième... Sans libérer mon visage de ses mains, il continuait à m'embrasser tendrement, lentement, longuement... Ses lèvres étaient chaudes et avaient la saveur d'un fruit, la douceur d'une caresse de bébé, la sensualité d'un amoureux fou... Cependant la paresse instinctive vieillissant au fond de nous deux, rendait ce lien qui avant l'apparence d'un succès garanti, un mariage gris entre deux êtres ratés de la vie, entre deux marginaux, deux orphelins assez orgueilleux pour céder à l'amour avec un grand A...

Le corps maigre du vagabond barbu avec le visage d'un ange, commença à devenir chaud, comme s'il était atteint d'une fièvre africaine... La lueur dans ses yeux était remplacée maintenant par une braise grattant, mais devant mon corps apeuré, il ne bougeait presque pas sans ma permission... Puis petit à petit, mon corps semblait atteint aussi de sa fièvre, et heureusement qu'on connaissait tous les deux le remède! Le remède était de laisser l'étoffe des corps coudait un lien invisible entre les cœurs, oublier la loi des humains et capituler à nos délires... Son corps maigre contre mon corps rempli! Son crane presque chauve contre mes cheveux bien présents! Sa couleur cramoisie contre ma blancheur un peu trop! Ses yeux sombres contre mes yeux clairs... Au début, je n'ai pas bien compris comment ces deux images si contradictoires pouvaient cohabiter! Mais dès qu'il a essayé de noyer sa fièvre dans ma chevelure, j'ai immédiatement remarqué qu'est-ce qui fait notre cohérence: sa masculinité est compatible avec ma féminité! Apparemment il avait un profil de femme gravé dans sa mémoire carrément différent de ce que j'offrais à lui! Et apparemment aussi, j'avais une image de l'homme basée sur une lecture lointaine, un livre de romance transparente, qui n'avait rien à avoir avec lui en chair et en os!

C’était nouveau pour nous deux; ces notions réalistes de l'amour et des relations sérieuses on n'en avait pas!

Le matin suivant une longue nuit, près mais loin de lui, ma chevelure était déjà sale et pleine de poussière... C'était comme se réveiller auprès d'un inconnu qu'on avait cru très proche pour un moment! La lueur remplacée par la braise, est maintenant remplacée par des milliers de questions secrètes, mais que je lisais très claire dans son regard perdu... Comme un vieux loup solitaire, il avait du mal à se sentir aimé pour qui il était, pas pour ce qu'on voulait qu'il soit! Pour une fois, il était aimé pour lui-même... De longs jours se sont écoulés avant qu'il soit enfin convaincu qu'il avait quelque chose en lui qui le rend spécial, qu'il méritait l'amour et la tendresse, et qu'il pouvait prendre soin d'une femme sans se prendre la tête par la performance! Mais je crois que le moment où il a vraiment senti mon amour pour lui, le sien pour moi, était dans le car du matin qui nous transportait pour un point où on allait se séparer pour quelque temps... C'était la première fois où j'ai réellement vu et senti son amour à travers son regard... Le vagabond est devenu enfin docile ? Je ne le crois pas…

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